L'Empire du Belondor
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L'Empire du Belondor

Micronation s'inspirant du Premier et du Second Empire français ainsi que de la Rome antique.
 
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 Ce n'est pas une émeute

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Feu Sa Majesté l'Empereur

Feu Sa Majesté l'Empereur


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MessageSujet: Ce n'est pas une émeute   Ce n'est pas une émeute EmptyMar 3 Aoû - 10:05

La chaleur était accablante. On étouffait à Elbêröhnit, en ce début de mois de Nabelnine. Dans exactement treize jours, on fêterait la naissance de l'Empereur qui donna son prénom au mois, le 18 Nabelnine (25 juillet). Les préparatifs de cette « fête nationale » avaient déjà commencés. Il s'agissait de faire une fête grandiose. L'Empereur voulait en effet en profiter pour célébrer l'unité nationale retrouvée, la paix, la grandeur et la prospérité nouvelle du Belondor. Pourtant, tout n'allait pas pour le mieux, contrairement à ce que l'Empereur et le Gouvernement auraient voulu que les Belondaures croient.

Depuis plus d'un mois régnaient une grève et une résistance passive dans le département du Bélière-et-Lande. Et aux élections départementales servant à désigner le conseil consultatif assistant le Préfet, qui eurent lieu il y a moins de dix jours, les électeurs de cette province de l'Empire avaient désigné une majorité libérale qui, l'avait-elle promis, chercheraient à promouvoir le fédéralisme et l'autonomie de toute l'Eslagne. Et pour cause, les départements des Champs-Verts et du Mont-Rouge avaient élu la même majorité... laquelle s'alliait aux radicaux et socialistes réputés républicains pour peser encore plus sur les décisions du Préfet. Dans les départements du Haut-Silibien, des Bouches de l'Avanle, des Valanques-Occidentales et de la Côte d'Argent, de fortes minorités libérales et républicaines furent également élues. Pire que tout, dans le département du Disueluve, et des Bouches de l'Avanle la majorité élue fut conservatrice. Pire que tout ? Oui, car ces conservateurs étaient plus que favorables aux Bordebon et ne furent ralliés à l'Empire qu'à mots couverts et par opportunisme, attendant le bon moment pour voir la Royauté être établie. Pourquoi eux ? Parce que la région était restée très Syiste comparée aux autres et qu'elle était un grand foyer d'immigration halawite, laquelle refusait de se conformer aux us et coutumes belondaures – et ce sujet devenait de plus en plus préoccupant, tous les maires de communes accueillant ces immigrés originaires d'Alaïenie principalement faisant le même constat –. L'Empereur souffrit beaucoup de ces résultats alors qu'il avait tant fait pour le Belondor. Il en concevait une certaine forme d'ingratitude. Très affecté, il paraissait prématurément vieilli, sa maladie prenant le dessus. C'était certainement pour cela qu'il voulait que le 18 Nabelnine 2712 fut un jour mémorable, car il sentait bien que ce serait certainement le dernier anniversaire qu'il aurait à fêter...

Mais le Peuple avait d'autres préoccupations. A Elbêröhnit, on souffrait toujours autant des grands travaux entrepris, et désormais au rude hiver succédait une canicule estivale écrasante. Ce climat avait grandement affecté les récoltes de l'année. A cela fallait-il ajouté que les grèves en Eslagne accentuaient le phénomène. Le ravitaillement de la Capitale s'en trouvait affecté et de fait, le prix des denrées aussi. Elbêröhnit n'était pas la seule grande ville exaspéré par un tel phénomène. Car Cancraces connaissait une situation de quasi pénurie, alors qu'Elbêröhnit pouvait encore se nourrir, bien que très difficilement. Mais l'énorme différence était qu'Elbêröhnit fut toujours une poudrière, prête à s'enflammer et exploser à la première étincelle, traditionnellement républicaine ou tout du moins libérale. Cette ville attendait donc beaucoup plus de l'Empereur, plus de réformes, plus de libertés, plus de souplesse et celui-ci la décevait...

Ce matin du Mediodine 5 Nabelnine 2712, l'Empereur admirait par la fenêtre les transformations d'Elbêröhnit. Il était persuadé que c'est ainsi qu'il passerait à la postérité. Comme l'Empereur qui transforma la Capitale, qui en fit l'Impératrice des Cités, qui rénova et modernisa l'Empire. Du moins l'espérait-il... Il ne pouvait se douter de ce qui se tramait à cent mètres en dessous de lui, dans le dédales des rues non encore rénovées d'Elbêröhnit.

Ce matin-là, les queues avait débutée à 6 heures devant les boulangeries. Et celles-ci étaient longues, très longues... A 7 heures, contrairement aux habitudes (généralement jusqu'à 8 heures on servait la première fournée), il ne restait plus rien, plus de pain. Les Elbêröhnitois, très mécontents commencèrent à manifester leur désapprobation d'une telle situation. Et à de multiples endroits, il fallut faire intervenir la police pour les disperser. Jusqu'à 8 heures et quart, la situation était donc électrique mais maitrisée par les forces de l'ordre appuyées par la Gendarmerie. Mais à 8 heures trente tout bascula. Lors du percement d'un nouveau boulevard, parallèle à l'Avenue de l'Empire, un immeuble mal entretenu et aux fondations trop anciennes s'effondra sur les ouvriers venus pour le démanteler. Résultat : 6 morts et plus de trente blessés. C'en était trop pour la Capitale. Lorsque l'information remonta jusqu'aux quartiers populaires encore existant, puis jusqu'en banlieue, le Peuple s'embrasa. Il ne pouvait en supporter plus. Il ne pouvait accepter plus, seulement pour la grandeur de l'Empereur et le confort des « honnêtes gens de la haute ». Bousculant les forces de l'ordre, dévalisant les armureries, s'armant de pics, de pioches, de lances, de bâtons, le Peuple d'Elbêröhnit marcha et prit un à un les commissariats, massacrant les gendarmes et policiers ayant eu l'audace de s'opposer à leur avancée. A neuf heures trente, quasiment toute la ville était en la possession de ces 150 à 200 000 hommes, femmes et adolescents prêts à en découdre, à se défendre pour leur vie, leur dignité.

Se rendaient-ils alors compte qu'ils avaient en leur pouvoir de renverser l'Empire, personne ne pouvant alors leur résister ? L'Empereur s'en rendaient compte, lui :


- Votre Majesté...
- Oui ? demanda l'Empereur, en levant la tête qu'il avait basse, penchée qu'elle était sur le futur Code Général de la Fiscalité Nationale, qu'il comptait faire prochainement adopter par la Diète.

Le Grand Chambellan du Palais Impérial, le Duc Caulaincen Ambroisies de Beneline, avait été choisi pour annoncer la nouvelle à l'Empereur. Or, celui-ci n'était plus vraiment en odeur de sainteté, accusé qu'il était par Sa Majesté d'avoir négligé la ville dont il était maire et donc d'avoir laissé s'installer une situation provoquant une grève générale dans toute le département du Bélière-et-Lande.


- Votre Majesté... la situation est grave. Ce matin, un immeuble s'est effondré, provoquant de nombreux morts et blessés, exaspérant les Elbêröhnitois, déjà en colère de la pénurie de pain, et...
- Et à qui la faute Beneline ? Qui donc a totalement négligé la municipalité de Beneline ? Provoquant une grève générale dans presque toute l'Eslagne ? Engendrant une pénurie agricole ? Déclenchant une émeute dans Elbêröhnit ? Eh bien ! Qu'on la matte cette émeute.
- Mais...
- Quoi ?!?
- Majesté... ce n'est pas une émeute.
- Allons... croyez-vous que c'est en mentant que vous allez me trouver plus indulgent envers vous ?
- Non...
- Donc, ne me dites pas le contraire, lorsque je vous dis de mater cette émeute, qui est bel et bien une émeute.
- Ce n'est pas une émeute...
- Plait-il, Beneline ?
- C'est une révolution !

Beneline avait raison...
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MessageSujet: Re: Ce n'est pas une émeute   Ce n'est pas une émeute EmptyMar 3 Aoû - 11:43

Le Peuple d'Elbêröhnit était en armes et il marchait. Vers où ? Telle était la question. Il n'avait pas de but précis et il paraissait comme surpris par son audace. Celle de défier le souverain le plus puissant de la Terre. Et maintenant que faire, alors qu'il contrôlait tous les commissariats, toutes les gendarmeries, que la légion la plus proche était à 10 kilomètres et certainement pas encore prévenue et de toute façon surpassée par le nombre en cas de conflit ? La réponse en fut donnée par le député Jules Devrafes, élu d'Elbêröhnit, qui vint à la rencontre de ses administrés et leur annonça l'intention d'une vingtaine de députés de déposer une motion de censure à l'encontre du Gouvernement de l'Empereur, suivant l'article 8 de la Constitution. Acclamé, il fut suivi tout au long de son trajet jusqu'à l'Hôtel Amezzianel, où siégeait la Diète.

Avec dans sa poche le soutien de 200 000 Elbêröhnitois prêts à fondre sur les députés, le député en question, appuyé fortement par le Razard, le radical-socialiste bien connu et chef de son « parti », il n'eut aucun mal à obtenir le soutien de toute sa tendance et de l'immense majorité des libéraux à sa motion de censure. Pour la première fois, une motion de censure était déposée alors même que rien n'assurait que les députés en aient le pouvoir. Pourtant, le président de la Diète l'admit immédiatement comme recevable ! A l'immense fureur du Gouvernement, qui tenta alors d'opposer l'irrecevabilité, en s'appuyant sur sa majorité. Mais celle-ci apeurée, effrayée par les cris que l'on entendait venant du dehors, du Peuple d'Elbêröhnit, n'osa contredire le président... s'en remettant à l'Empereur. La séance étant alors levée de par les intrusions des insurgés dans l'hémicycle, députés de la majorité et membres du Gouvernement s'enfuirent, craignant pour leur vie...

Ce récit des évènements parvint jusqu'aux oreilles de l'Empereur effaré...


- Ainsi donc, ces pleutres ont préféré accepter la déposition d'une motion de censure que de faire respecter le droit ? Encore heureux que les députés de l'opposition ne se rendirent pas compte de l'immense avantage qu'ils pouvaient tirer de la situation... il eut suffit qu'il fasse voter la motion de censure sur le champ et je suis certain que l'ensemble des députés l'auraient approuvé ! Et nous aurions le parlementarisme avec toute la corruption et l'oligarchie qu'il peut entrainer ! Eh bien, cela ne se passera pas ainsi ! Je dissous la Diète et je déclare l'ensemble des actes pris par celle-ci depuis ce matin illégaux ! Avec la Garde Impériale au sein de la Capitale, je gage que le Peuple se dispersera sans oser combattre...

Le bras de fer s'engageait désormais. L'Empereur entendait bien faire respecter la Constitution et le droit face au coup de force des députés de l'opposition, manipulant un Peuple affamé, épuisé à son seul et unique profit.
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MessageSujet: Re: Ce n'est pas une émeute   Ce n'est pas une émeute EmptyJeu 5 Aoû - 0:27

Comment donc la Garde Impériale réagirait ? Telle était la question. Celle-ci était répartie en quatre endroits différents. Au Palais résidaient deux régiments de grenadiers et un de zouaves, ainsi que l'ensemble de l'artillerie de la Garde Impériale, auxquels il fallait rajouter les deux régiments de cuirassiers de l'Empereur, le régiment de dragons de l'Impératrice et le régiment de lanciers du Roi d'Ardanie pour un total de 10 000 hommes. Dans le Xème arrondissement, au nord-est de la Capitale, prenaient leur cantonnement 3 500 hommes, à proximité de la Bourse. Au sud-est, dans le IIIème arrondissement, près de la Gare du Sud, il y avait 8 250 hommes. Enfin, à l'ouest, dans le VIIIème au sud de la Gare de l'Ouest, il y avait 8 000 hommes. Tout dépendrait en définitive de l'Empereur. Celui-ci ferait-il tirer sur le Peuple ou, comme telle avait toujours été sa position, préfèrerait-il mettre sa vie en danger plutôt que de devoir faire couler le sang du Peuple ? Alors que la situation on ne peut plus dangereuse était connue de tous au Palais, le Duc de Beneline prêchait la fermeté.

- Votre Majesté, vous ne pouvez vous laisser ainsi offenser ! Il faut faire intervenir la Garde Impériale !
- Et voir des dizaines de milliers de Belondaures mourir ? Ils sont 200 000 en face, ne l'oubliez pas ! Souhaitez-vous donc que je passe à la postérité comme un boucher ? Je préfèrerais encore être un martyr...
- Mais... vous n'allez pas laisser ces républicains manipuler le Peuple pour renverser tout ce que nous avons établi depuis dix ans !?!
- A qui la faute, vais-je me répéter, Beneline !

Sachant pertinemment qu'il avait une responsabilité particulière dans le déroulement des évènements, le Duc ne dit mot supplémentaire. L'Empereur quant à lui réfléchissait toujours, grimaçant. Son ventre, son estomac le faisait on ne peut plus souffrir. « Ce n'est pas le moment de flancher. L'esprit doit l'emporter sur la matière, sur mon corps. Je ne dois pas céder à la douleur ». Mais que pouvait-il contre la maladie ?

- Envoyez des messagers discrets informer les détachements hors du Palais d'évacuer la Capitale immédiatement et de rejoindre la légion XL du Corps d'armée VIII qui stationne à Sellesrai. Ils doivent se tenir prêts à toute éventualité, mais attendre mes ordres. De toute manière, les légions XIX, XX et XXXIX étaient censées venir à Elbêröhnit pour le défilé du 18 Nabelnine. Elles devaient arriver le 10 au plus tard, il suffira d'aller à leur rencontrer si nécessaire...
- Bien, votre Majesté, répondit Beneline.

L'Empereur venait de prendre une décision capitale : il ne ferait pas tirer sur le Peuple.

- Charles, dit l'Empereur appelant son secrétaire particulier Charles Degaulle.
- Votre Majesté...
- Informez le commandant de la Garde Impériale qu'il ne doit surtout pas s'opposer au Peuple s'il lui prenait l'envie de venir au Palais Impérial. Sauf si bien sûr, celui-ci voulait attenter à la vie des Gardes.
- Euh... Bien, votre Majesté.
- Le sort de l'Empire se joue, aujourd'hui.

Le sort de l'Empire, certainement. Le sort de sa vie et de celle de sa famille, à n'en pas douter non plus.
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Caulaincen de Beneline(†)

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MessageSujet: Re: Ce n'est pas une émeute   Ce n'est pas une émeute EmptyJeu 19 Aoû - 0:32

Caulaincen Ambroisies, Duc de Beneline, maire de cette même ville, ancien Ministre d'État, président du Sénat et actuel Grand Chambellan du Palais Impérial était parfaitement conscient qu'il ne pourrait rester en place après ce qu'il s'était passé depuis le début de la matinée. L'Empereur, il l'avait bien compris, celui-ci le lui ayant bel et bien fait sentir – sans compter la Cour qui ne le regardait que comme un futur disgracié, l'Empereur le considérait comme en partie responsable des évènements de ce 5 Nabelnine. « Je suis condamné », se répétait-il à longueur de temps. Il le savait. Il n'avait aucune chance de pouvoir conserver ses actuelles fonctions après son échec à Beneline. Cette ville, il en était le maire. Or, après l'adoption par le Ministre de l'Échiquier et de l'Intérieur, Etzel Ito, Duc de Varsalance, également Chancelier de Leurs Majestés Impériales, de l'arrêté portant prohibition de l'emploi des patois – qui interdisait donc l'usage des langues régionales, qualifiées d'« idiome féodal » par l'arrêté – la réaction de la population benelinoise, fortement attachée à ses traditions et à sa culture eslagnaise (l'Eslagne ayant été réunie à l'Empire après la Guerre de Réunification il y a maintenant quatre ans), avait été des plus hostile à cet acte règlementaire. Ils étaient pour la majorité déterminés à lutter contre l'assimilation à la culture belondaure que voulait leur imposer Elbêröhnit, le centre de l'Empire, le centre du monde. Ils souhaitaient défendre leur identité nationale eslagnaise, leur autonomie culturelle et avait pour cela fondé la Confrérie patriotique eslagnaise. Le Belondor, centralisateur par tradition, et à l'excès depuis que l'Empire avait été rétabli, s'y opposait naturellement. Méprisant ces « patriotes eslagnais », alors même que depuis la Réunification il exigeait que les anciens sujets du Royaume d'Eslagne belondaurisent leur prénom, il avait refusé toute négociation, et la Confrérie s'était retrouvée humiliée, déconsidérée. Les éléments les plus durs et extrémistes, les indépendantistes en sommes s'étaient rassemblés pour fonder une nouvelle organisation clandestine. Bien plus intransigeante, bien plus belliqueuse : l'Armée nationale eslagnaise. Il y a quatre mois, ce groupuscule terroriste était entré dans l'Histoire par la grande porte, mettant sur pied un attentat alors que le Préfet du Bélière-et-Lande se rendait à l'opéra avec son épouse. Dix-huit personnes avaient péri, dont son épouse. La réponse du centre avait été à la hauteur. Choqué, effondré, désemparé, le Préfet, Monsieur Albert Varsan, avait demandé à être démis de ses fonctions. L'Empereur avait alors accepté. Et avait envoyé son remplaçant en la personne même du Vice-Ministre de l'Intérieur, Tancrède Batignoles, lequel était chargé d'une mission extraordinaire, puisque pour la première fois l'Empire délocalisait, de manière certes provisoire, un de ses membres du Gouvernement ! Cela n'avait pas calmé la population pour autant. La répression, la surveillance, n'avaient pas étouffé le mouvement. Une grève éclata. Limitée à Beneline au départ, elle s'étendit à l'ensemble du département : industries, mines, port, commerces, agriculteurs, tous se mettaient en grève. La loi autorisant et régulant le droit de grève à peine votée, c'était une grève générale qui avait éclatée dans le Bélière-et-Lande laquelle s'étendait d'ailleurs, mais de façon plus sporadique aux deux autres départements de culture eslagnaise, le Mont-Rouge et les Champs-Verts. La suite était connue et on en voyait les conséquences actuellement. Beneline en voyait les conséquences, sous ses propres yeux, à quelques dizaines de mètres sous lui. Beneline était irrité de porter seul le chapeau d'une situation qu'il n'avait ni voulu ni déclenché. Après tout, c'était Varsalance qui avait adopté l'arrêté sur l'ordre de l'Empereur ! Et c'était à lui que l'on faisait porter la responsabilité de la dégénérescence de la situation ! Certes, il n'était pas à Beneline lorsque la grève a éclaté et il n'avait pas cherché à y rentrer... certes, il ne publia aucun arrêté ou ne se fit pas entendre afin de condamner cette opposition frontale à la politique impériale. En fait, c'était surtout cela que lui reprochait l'Empereur. Ce n'était pas tant de n'avoir pas sur prévenir la situation que de n'avoir rien fait pour la juguler. Et maintenant, c'était Elbêröhnit qui s'y mettait !

- Foutu pays, pesta le Duc de Beneline en regardant par la fenêtre de son bureau, accolé à celui de l'Empereur des Belondaures, alors qu'il s'apercevait que les révoltés, bien calmes depuis deux heures, se remettaient en marche en direction du Palais Impérial et qu'ils commençaient leur ascension de la Pente du Souverain, unique chemin pour accéder au Plateau des Empereurs.

Il se retourna et contempla son bureau. La pièce, spacieuse, ressemblait à un simple bureau de fonctionnaire, avec un tapis rouge sur le sol de marbre à damier blanc et noir et le mur blanc à frise dorée. Elle contenait simplement un bureau, un coffre, une armoire et une commode afin d'y ranger les documents les plus précieux. Une chaise était installée face au bureau du Grand Chambellan, à la disposition d'un interlocuteur très certainement. Il y avait aussi un lit pliant dans le coin près de la porte. Beneline se souvint avoir passé nombre de ses nuits ici. Il l'avait fait installer afin de pouvoir se se reposer quelques instants, tout en étant disponible lorsque l'Empereur travaillerait très tard jusqu'au plus profond de la nuit. Seule une petite statue du premier Empereur des Belondaures, Antonine Ier posée sur son bureau, et un tableau du sacre de Nabelnine sur le mur qui lui faisait face, rappelaient que la pièce appartenait à un homme d'État. Il y avait aussi une glace à sa droite. Il se regarda dans celle-ci : il avait désormais cinquante-huit ans. Les années étaient passées à une vitesse folle, lui qui se revoyait il y a dix ans, alors simple secrétaire particulier de celui qui deviendrait Empereur des Belondaures, l'accompagnant sur tous les champs de bataille. Il l'avait tellement accompagné qu'il lui ressemblait désormais. Cela le frappait alors qu'il faisait face à son reflet : si ce n'est le crâne qu'il avait dégarni, n'ayant ses cheveux noirs que sur les côtés et l'arrière de celui-ci, il avait comme l'Empereur des yeux bleus en amande et une moustache et un bouc à l'impériale. Il était cependant plus grand que l'Empereur, mesurant un mètre quatre-vingt quand celui-ci faisait cinq centimètres de moins... et plus de ventre aussi que le Souverain. Beneline repensa à cette époque bénie, alors qu'il avait encore des cheveux et la tenue svelte. Il avait travaillé dur pour gagner la confiance du général en chef des « armées bleus » rassemblant républicains et partisans de l'Empire comme de la Royauté face aux « armées rouges » des communistes et anarchistes qui contrôlaient le pays. Il avait finalement réussi à gravir tous les échelons et avait passé quasiment tout son temps ici, dans cette pièce, depuis le rétablissement de l'Empire, après qu'il fut immédiatement nommé à sa charge de grand dignitaire de l'Empire une fois celui-ci plébiscité... onze jours seulement après la prise d'Elbêröhnit. C'était il y a cinq ans bientôt. Il n'avait pas vu le temps passer... un temps qu'il avait passé à travailler encore plus dur, rarement en présence de ses proches. Il le regrettait maintenant, quelques fois... Il avait perdu son épouse il y a peu de temps, en plein déclenchement de la grève générale en Eslagne, celle-ci ayant été terrassée par la fièvre jaune. Ne lui restait donc que sa fille unique, la douce et blonde Athénaïs, à la peau rosée et aux yeux d'un bleu étincelant. Il aimait sa fille, plus que tout au monde. Elle était son bonheur, sa joie. Elle lui avait manqué pendant les deux ans qu'elle avait passé à l'Institut Saint-Antoine des Roseaux à Beneline. Il ne passait jamais plus de cinq jours par mois à Beneline, alors même qu'il en était le maire. C'était pourtant le seul moment, la seule occasion qu'il avait alors de voir sa fille. C'était trop pour Beneline, c'était trop aussi pour sa défunte épouse, et ils lui avaient demandé de les rejoindre, il y a une demi-année, juste après ses seize ans. Aujourd'hui, elle étudiait au Lycée de l'Empereur, le plus prestigieux d'Elbêröhnit. Et Beneline tenait encore plus à elle, maintenant qu'il était veuf. Elle était tout ce qui lui restait en effet. Il voulait la protéger. La protéger des coureurs de jupon qui pouvaient exister à la Cour. En réalité, il savait qu'il n'était pas besoin pour lui d'être surprotecteur. Sa fille bien qu'admirablement agréable et aimable n'était pas sotte et ne se laissait pas manipuler par les hommes, quels qu'ils soient... D'autant que, comme l'avait deviné Beneline au cours des multiples réceptions et festivités qui avaient eu lieu depuis son retour au Palais Impérial, sa fille semblait grandement intéressée par le Roi d'Ardanie, l'Héritier du Trône, Maxenine-Nabelnine, appelé un jour à régner sur l'Empire. Le vieux Duc s'en amusait parfois. Jetant un coup d'œil vers sa fille qui discutait avec d'autres jeunes dames de la Cour dans la Salle des Fêtes, lieu des festivités de la Cour, il la voyait qui lorgnait fréquemment vers l'endroit où se trouvait le futur Empereur, âgé de dix-huit ans. Oh ! Jamais très longtemps, mais suffisamment pour qu'elle rougisse lorsqu'elle s'apercevait que son père la regardait en souriant. Beneline était perdu dans ses pensées. Soudain du bruit, un brouhaha grandissant, le sortit de sa torpeur. Il se rendit compte qu'il s'était assis à son bureau. Se relevant, il écarta les rideaux de la grande fenêtre de son bureau et regarda quelle pouvait donc bien être l'origine d'un tel vacarme. Il vit alors que le Peuple en armes était arrivé sur le plateau et qu'il avait passé les grilles, puisque selon les ordres données par l'Empereur les Gardes Impériaux avaient quitté leur poste pour rester dans leurs quartiers, lesquels étaient dans le bois. Les insurgés semblaient guidés par des personnes de rang supérieur étant donnée leur allure soignée (malgré son âge, Beneline avait encore une excellente vue). Il reconnut certains des députés radicaux et socialistes qu'il avait si souvent affronté dans l'hémicycle de la Diète.

- Salopards de républicains... enfoiré de Razard, les injuria Beneline, serrant les dents à tel point qu'il failli s'en déchausser certaines.

Se retournant à la vitesse de l'éclair, Beneline ouvra un tiroir de son bureau et en sortit un pistolet de l'armée impériale et une petite boîte. Le genre de pistolet qu'avait sur soi un fantassin régulier. Ouvrant le barillet du pistolet, il fit de même avec boîte dont il sortit plusieurs cartouches, huit au total, afin de charger son pistolet. « Je ne les laisserai pas tuer l'Empereur... je ne les laisserai pas toucher à ma fille ».

Se mettant à courir, Beneline, ouvrit la porte de son cabinet et sortit dans les couloirs du deuxième étage du Palais Impérial. Ils étaient vides. Toute la Cour semblait avoir fui la Capitale ou tout du moins le Palais depuis que le déroulement des évènements lui étaient connus. Pas même un serviteur ne faisait remarquer sa présence... Le tapis rouge, parsemé d'abeilles, d'aigles et de « N » signifiant Nabelnine, qui couvrait toute la surface du parquet laissait deviner la trace de quelques meubles qui avaient été emportés... ou peut-être volés, même. Les rats quittaient le navire qui paraissait à la dérive. La peur avait envahi leurs cœurs et leurs esprits. Après avoir pris un virage à droite puis un à gauche, le Duc de Beneline courut pendant encore cinquante mètres avant de s'arrêter devant une petite porte en chêne d'aspect anodin qui menait par un escalier en colimaçon au troisième étage et à la section des appartements des grands dignitaires de l'Empire. Lorsqu'il sortit de cet escalier, il s'arrêta devant la première porte à gauche qui ouvrait sur ses appartements privés et ceux de sa fille. Beneline resta un moment devant sa porte, fermant les yeux, comme s'il invoquait les Dieux que sa fille ne soit présente. Passant à l'acte, il posa sa main sur la poignée de la porte, appuya dessus et ouvrit celle-ci. Il pénétra soucieux et inquiet, cherchant du regard sa fille unique. Il passa devant une pièce avec deux canapés et quatre fauteuils en hermine rouge et or, disposés tout autour d’une table en chêne noir. Il tira un rideau et entra dans sa chambre. Le lit était grand et large, recouvert d’une couverture rouge, où était brodé en fil doré l’aigle du Belondor et sa devise « Honneur, Sagesse, Gloire ». Un bureau de bois, habilement décoré et dessiné, lui faisait face, sur le quel était posé un buste représentant la personne de l'Empereur. Nabelnine y paraissait plus jeune et plus heureux qu’à présent. Et pour cause. Il venait d'être plébiscité Empereur lorsque celui-ci avait été réalisé... il n'était alors ni malade, ni menacé par deux cents mille personnes en armes. Sa fille était assise à ce bureau, écrivant dans son journal intime. Lorsque relevant la tête, elle s'aperçut que son père était là, elle lui sourit tout en refermant son cahier. Mais à la vue de la mine que faisait son parent, elle arrêta de sourire très rapidement :

- Que se passe-t-il père, lui demanda-t-elle inquiète.
- Ma fille... Athénaïs... n'entends-tu pas ce qu'il se trame au dehors, lui répondit-il en la prenant dans ses bras. C'est une révolution...
- Une révolution... mais père... c'est impossible.
Je le croyais aussi. Mais les faits sont là. Ce sont les républicains qui sont responsables ! Ils nous ont trahi. Ils nous trahissent alors que la Gélèbre, le Matnal, la Grande-Albion n'attendent que cela pour se jeter sur le Belondor et que le Despotat halawite d'Al-Harlkoum n'attend qu'une faille de notre parts pour nous attaquer en Alaïenie. Plutôt que de réaliser l'unité nationale, ils veulent nous affaiblir et renverser le régime ! Pour leur idéologie ! Alors que les circonstances exigeraient l'unité nationale...

Sa fille se déserra alors de son étreinte et le regarda dans les yeux. Elle paraissait au bord des larmes. Elle ressemblait tellement à sa mère, aux yeux de Caulaincen... Ce n'était pourtant qu'une enfant :

- Tu dois fuir, te cacher... n'importe où !
- Mais toi ? Que...

Elle vit alors que son père avait posé un pistolet sur le bureau auquel elle s'était assis depuis le début de l'après-midi.

- Père... non !
- Ne discute pas ! Va tenter de retrouver la Famille Impériale et fuis avec eux.
- Mais...
- Par pitié, Athénaïs ! Obéis-moi ! Je t'en conjure, pour l'amour de ta mère !

Athénaïs craqua et se mit à pleurer à chaudes larmes. Elle avait saisit le sens du geste de son père. Elle se leva et commença à marcher pour sortir de la chambre. Brusquement, elle se retourna et se jeta dans les bras de l'homme qui l'avait aimé plus que tout au monde et dit tout en pleurant :

- Je t'aime, papa !!!
- Moi, aussi, je t'aime mon enfant. Va, maintenant !

Se défaisant de l'étreinte de sa fille, il la poussa à s'en aller ce qu'elle fit. Lorsqu'il entendit la porte de ses appartements privés s'ouvrir puis se refermer, il sut qu'elle était sortie. Il put alors s'effondrer et pleurer à son tour... Il était certain que ce fut la dernière fois qu'il voyait sa fille chérie. Il le savait. Il ne survivrait pas à ce qu'il avait prévu de faire.

Il était quinze heures vingt. Beneline marchait dans les couloirs du premier étage. Il arriva enfin sur l'immense mezzanine par laquelle on accédait par deux escaliers de marbres blanc disposés de par et d'autres de celle-ci. Descendant à toute allure l'un de ces deux escaliers, il accéda à cette immense salle que l'on nommait vestibule où était disposées de part et d'autre d'un tapis rouge, semblable à ceux disposé dans les couloirs des étages mais bien plus long et large (qui lui-même reposait sur un damier ocre et blanchâtre de marbre), deux rangées de dix colonnes de cinq mètres de haut chacune et des tableaux représentants les plus hauts faits militaires de la Nation. Beneline voyait les insurgés arriver aux portes du Palais, traversant le cour. Deux immenses statues, hautes d’au moins vingt mètres, et une fontaine non moins splendide devançaient les dix-neuf marches menant au perron qui devançait la grande porte de la demeure de l'Empereur, gardée habituellement par la Garde Impériale mais aujourd'hui totalement démunie. Dans un fracas monumental, les insurgés, Razard en tête, entrèrent dans le vestibule, hurlant leur haine. Beneline les attendaient.

- Vous ne ferez pas un pas de plus. Vous ne passerez pas et retournez à vos foyers, leur lançai-t-il en criant si fort que ceux qui pouvaient l'entendre s'arrêtèrent de hurler.

Razard s'avança, suivi de ses plus fidèles compagnes et des rebelles les plus enragés. Affichant un rictus de mépris, il asséna à Beneline :

- Tu es condamné mon pauvre Beneline. La loi du Peuple, la loi de la Diète te condamne et bientôt la loi de l'Empereur te condamnera ou bien il ne sera plus Empereur. Tu auras ta tête au bout d'une pique, quoi qu'il arrive !

Calmement, Beneline sortit sa main droite tenant son pistolet de sa poche. Razard effectua alors un mouvement de recul, quelque peu surpris :

- J'ai dit que vous ne passeriez pas, répéta Beneline.

Razard reprit sa moue de mépris envers Beneline. S'avança alors un géant de plus de deux mètres, fort comme un taureau dont il avait d'ailleurs le cou. De sa voix de grave et résonnante, il dit tout en s'avançant un sabre à la main :

- Finissons-en !

Il leva son sabre sur Beneline, se préparant à le frapper, mais le Duc fut plus rapide et il le tua d'un tir en plein cœur. Alors, un déferlement de cris et de haine s'abattit sur le Duc. Celui-ci parvint à vider son chargeur, tuant quatre personnes et en blessant trois. Mais il n'y survécu pas. Les députés meneurs ne parvenaient plus à contrôler les insurgés désormais. Pris par une crise de folie barbare, ils se ruèrent sur le pauvre ami de l'Empereur qui fut tué de plusieurs coups de piques, de baïonnettes, de sabres, de lances, sans oublier les armes à feu... Son corps ne ressemblait plus à rien lorsque les fous en eurent fini avec lui. Son corps abimé et en lambeaux était abandonné sur le sol. Razard le regarda gisant dans une marre de sang, effrayé par ce qu'il venait de voir et en même temps absolument dégoûté par l'aspect du cadavre. Ainsi s'éteignait un des plus grands serviteurs de l'Empire et du Belondor, intègre et travailleur. La révolution continuait son cours pendant ce temps...
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Feu Sa Majesté l'Empereur

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MessageSujet: Re: Ce n'est pas une émeute   Ce n'est pas une émeute EmptyMer 17 Nov - 14:53

L'Empereur, comme toute la Famille Impériale, avait entendu le premier coup de feu. Puis les cris, puis d'autres coups de feu... Puis plus rien. Que s'était-il passé ? Il n'en avait aucune idée, et à vrai dire il n'était pas sûr de vouloir le savoir. Il était là, replié en ses appartements impériaux, dans sa chambre, lesquels étaient contigus à la chambre de son épouse, trois pièces à l'est de la salle à manger privée et luxueuse dont toute la Famille Impériale disposait. Celle-ci était toute entière avec lui en ce moment des plus funestes, dont son oncle, Monseigneur Phillipus-Alexandrum de Temararien, également Ministre de la Couronne. Sa fille cadette, Maria-Aurélia se tenait serrée contre lui. Machinalement, il lui avait caressé ses cheveux, puis, nerveusement, avait fini par faire des boucles avec ceux-ci. Son épouse, Alaïena, était inquiète, et elle serait très fortement un napperon qu'elle avait commencé à coudre il y a de cela quelques jours. Son fils benjamin, Amezzianel-Nabelnine en revanche, paraissait totalement surexcité, marchant en rond, murmurant à voix basse quelques injures contre les manifestants, frappant dans ses poings. A tel point qu'à de nombreuses reprises sa mère lui avait demandé de bien vouloir cesser son manège. Mais après deux minutes de calme, il reprenait. Quant à son oncle, assis sur le lit, il tremblait de tous ses membres. Étrangement, le plus calme était son fils aîné, Maxenine-Nabelnine. Malgré son très jeune âge, il faisait preuve d'un immense sang-froid, semblant ne pas être concerné par ce qu'il se passait. Il était tranquillement assis, en retrait, dans le fond de la pièce, les coudes sur les genoux et la tête reposée sur les mains. Il semblait rêver, le regard fixant un point au lointain. Mais en réalité, il ne regardait rien et il avait les yeux dans le vague, pensif...

L'Empereur se demandait s'il avait bien fait de refuser que la Garde Impériale s'oppose à l'entrée des émeutiers sur la plateau Ceronine II, afin d'éviter un massacre. Il lui apparaissait évident qu'il n'aurait eu aucun mal avec les meilleurs soldats de l'Empire, voire du monde entier, à repousser les insurgés. Comment en aurait-il peu être autrement alors même que la voie menant au Palais Impérial était des plus étroites, que les insurgés étaient mal armés, et qu'à l'inverse la Garde Impériale disposait du matériel dernier-cri, d'une discipline de fer et d'une position des plus avantageuses, en hauteur ? Mais non. L'Empereur Nabelnine Ier ne voulait plus faire couler le sang des Belondaures par les Belondaures. Il se l'était juré depuis la fin de la Guerre Civile. Il ne ferait pas tirer sur le Peuple, jamais. Même lors du « coup d'État », qu'il nommait lui-même « reprise en main » du 33 Maxenine 2708, il y a presque quatre ans, il avait refusé de faire couler le sang. Et les rares morts qu'il y eut pu avoir l'avaient été par accident, par suite de blessures ou par suicide. Et pourtant, il s'en voulait de ces dix-neuf morts... Et depuis, il se l'était promis. Il se l'était interdit : il ne ferait plus couler le sang du Peuple. C'est ainsi qu'il avait ordonné à la Garde Impériale de rester à l'abri dans ses quartiers, dans le bois. De n'en sortir sous aucun prétexte. D'attendre ses ordres. Il jeta un coup d'œil rempli de regrets vers les bois, il voyait quelques centaines d'émeutiers s'en approcher, mais sans chercher à y pénétrer. « Au moins, j'aurai épargné la vie de dix mille Gardes », se dit-il alors. Car, il devait se l'avouer, il ne savait pas s'il pourrait sauver sa famille en revanche... Et il culpabilisait de lui avoir imposér son destin. Il était persuadé qu'il allait mourir cet après-midi d'été très chaud. En martyr ? Seule l'histoire jugerait... ou plutôt ceux qui l'écriraient. Il était trop rusé et avait trop vécu pour savoir que seul le vainqueur l'écrivait et uniquement à sa convenance.

Seulement, pouvait-il entrainer avec lui toute sa famille ? Il avait décidé d'accepter la mort pour son compte. De toute manière, il en était persuadé, il ne lui restait que peu de temps à vivre, sa maladie, bien que lui laissant quelques répits de temps en temps, le faisait chaque fois plus souffrir lorsqu'elle réapparaissait. Il ne voulait plus de cette souffrance et d'une certaine manière, il attendait la mort comme une délivrance. Mais pouvait-il imposer à son épouse de quarante ans un tel sacrifice ? Oh, il en était persuadé, elle le suivrait, par amour et loyauté. Mais lui ne se pardonnerait pas cela... comme il ne se pardonnerait pas d'entrainer dans sa mort celle de sa fille de dix-sept ans, son plus jeune fils du même âge, ainsi que l'Héritier du Trône, à peine majeur. Non, il ne le pouvait décemment pas. Il ne pouvait, par égoïsme, entrainer dans l'au-delà toute sa famille... Mais il n'eut pas le temps de plus réfléchir à ce qu'il pourrait faire pour éviter l'inéluctable. Il venait d'entendre des portes claquer, s'ouvrir avec fracas. Les émeutiers pénétraient dans les appartements privés de la Famille Impériale. Il les entendaient traverser en hurlant les différentes pièces, s'avançant le salon, brisant des lustres, des vases, déchirant les tableaux, beuglant, vociférant. Toute la Famille Impériale paraissait cette fois-ci terrorisée. Même Maxenine s'était relevé pour se rapprocher de sa sœur, tandis que son dernier fils, son oncle avec son épouse se mettaient en retrait derrière lui. Dans quelques secondes, les insurgés allaient pénétrer dans sa chambre et tout serait fini... La porte s'ouvrit brutalement. Des dizaines de personnes entrèrent, armées de fusils, de pistolets, de sabres, de piques, de couteaux longs, hurlant et criant leur haine. Quelques-uns l'insultèrent en entrant, lui donnant du « tyran », du « dictateur », du « oppresseur », du « buveur de sang ». Mais l'Empereur resta digne. D'un geste puissant de la main droite, il poussa sa fille, et avec elle l'Héritier, derrière lui. Et il s'avança lentement à la rencontre des insurgés. Étrangement, certainement surpris par l'attitude de l'Empereur, ceux-ci baissèrent de la voix et finirent par être silencieux. C'était une étrange situation à laquelle on avait affaire. L'Empereur, du haut de son petit mètre soixante-dix faisant face à des dizaines d'insurgés, au départ très hostiles, mais qui semblaient désormais impressionnés par tant de tenue et l'attitude d'autorité qu'adoptait celui qui était encore leur souverain et Chef d'État, la tête haute et le port altier, regardant chacun d'eux dans les yeux, ne se défaussant pas et ne déviant pas du regard, ne clignant pas des yeux. La bizarrerie de la scène fut rompue par un homme se détachant de la foule. Il était très petit, à peine plus d'un mètre soixante. Mais il était bien mieux habillé que la plupart. L'Empereur le reconnu aisément. Il s'agissait d'un député libéral, d'Elbêröhnit, Anselme Tyureau. Il avait de multiples papiers à la main et il leva la tête vers l'Empereur, ouvrant la bouche pour commencer à parler. Mais l'Empereur leva la main. Et alors, se ridiculisant, le député se tut, montrant encore l'autorité dont pouvait bénéficier l'Empereur. Ce fut ce dernier qui rompit le silence :


- Que voulez-vous, Monsieur Tyureau ? Pourquoi venez-vous ainsi, appuyé par des centaines de gens en armes ? Pourquoi donc cette rupture avec les mœurs civilisées ?

L'Empereur avait pris un ton très faussement détaché et amusé, tentant de se faire rendre compte au Peuple de l'idiotie et de la stupidité de la situation, et d'apparaitre humain et plein de savoir-vivre, loin de l'image d'un tyran assoiffé de sang, comme avait pu le décrire le démagogue Razard du haut de l'Arc de Triomphe à ce que lui avait rapporté son agent secret Mathieu Vasseur. Il avait également réussi à déstabiliser son interlocuteur, alors même que l'ensemble de la foule, de plus en plus nombreuse, restait silencieuse, telle celle écoutant le sermon d'un prêtre. Finalement, prenant sur lui, après avoir bafouillé quelques mots et observé de part et d'autres les regards des insurgés braqués sur lui, le député parvint à s'exprimer :

- Majesté... euh... Monsieur de Temararien...
- Majesté, coupa sévère l'Empereur. Appelez-moi comme il se doit où je ne vous écouterai pas plus longtemps.

A ce moment un brouhaha parcouru la foule des insurgés, certains appelant même à la mort du souverain. Mais finalement, des voix s'élevèrent pour réclamer le silence afin que l'on puisse laisser parler le député, qui continua alors :

- Bien... si vous voulez. Majesté, au nom du Peuple souverain, je viens vous demander de promulguer ces textes législatifs, régulièrement adoptés par la Diète, issue du suffrage universel direct du Peuple souverain, représentante de la souveraineté nationale.

Tendant les feuilles à l'Empereur, celui-ci les prit et les examina. Ceux-ci étaient très divers en nature, mais riches de revendications ! Il y était demandé ni plus ni moins que le retrait du décret de renvoi d'Origodes et sa confirmation comme président de la Diète, l'acceptation et la reconnaissance officielle du parlementarisme ainsi que la liberté d'association visant à reconnaître la formation de partis politiques, l'abrogation du Code de la Presse, ce qui signifiait la liberté totale de la presse, y compris dans la diffamation. Enfin, le dernier texte était à ses yeux celui qu'il était le moins susceptible d'adopter : l'abandon de la conscription et la constitution d'une armée de volontaires en surplus d'une Garde Populaire auxquels tous les citoyens mâles recensés seraient susceptibles de faire en partie en cas de guerre, et au sein de laquelle les citoyens s'organiseraient librement. Il n'y avait aucune chance que l'Empereur accepte ainsi de se faire forcer la main, et ce d'autant plus que la Diète n'avait pu délibérer librement et en toute sérénité. L'Empereur ayant terminé de lire, détacha les yeux des papiers en question. Il regarda le député droit dans les yeux, qui baissa rapidement la tête, ne parvenant pas à soutenir le regard inquisiteur de l'Empereur. L'Empereur porta alors son regard sur les insurgés, tentant de lire sur leurs visages leurs convictions profondes... Finalement, il dit :

- Est-ce donc pour cela que vous vous êtes révoltés et êtes devenus hors-la-loi, commença l'Empereur, le regard empli de compassion. Si une partie m'est inacceptable, l'autre allait venir sous peu... Je ne puis croire que vous risquiez votre vie uniquement pour que quelques députés bourgeois aient le droit de s'arranger entre eux quant à la conduite politique des affaires du pays...
- Non, vous avez raison !

L'Empereur vit s'avancer vers lui Razard, un rictus aux lèvres, tel l'homme qui sentait son triomphe à portée de main. La mâchoire de l'Empereur se crispa devant ce qu'il ressentait comme une trahison. Après avoir tant fait pour se rallier les socialistes et radicaux au gouvernement, les voir ainsi profiter d'une petite émeute pour provoquer la chute du régime et une véritable insurrection le mettait hors de lui. Mais l'Empereur fit en sorte que nul ne s'en rendit compte et tenta de paraître toujours aussi digne :

- Monsieur le Vicomte, commença l'Empereur. Vous voilà...
- Oui, me voilà, Sire, répondit le Vicomte. Et avec d'autres revendications, que voici !

Il tendit les autres textes à l'Empereur. Cette fois-ci ce dernier crut qu'il allait véritablement mourir d'apoplexie tant les exigences étaient exagérées. Il était ni plus ni moins demandé à l'Empereur d'approuver un texte qui fixait un prix par la loi pour tous les produits de l'alimentation quels qu'ils soient, et autorisait le Peuple d'Elbêröhnit à se constituer en commune, institution de surveillance afin de traquer les profiteurs capitalistes et les accapareurs. Un autre texte lui demandait d'ailleurs d'approuver la condamnation à mort sans procès de ceux-ci, mais également des « instruments de l'oppression impériale », comprenant agents du Bureau Impérial de la Répression Insurrectionnelle, commissaires de police, Gendarmes ainsi que les maires d'arrondissement et leurs adjoints. L'Empereur rendit les textes à Razard et le regarda dans les yeux. A la différence de Tyureau, celui-ci ne baissa pas les yeux et semblait savourer la réussite de sa stratégie. Celle-ci, Nabelnine l'avait percée à jour. Quelle était-elle ? Elle était bien simple et à la fois implacable. Exiger de l'Empereur tellement de concessions qu'il ne pourrait que refuser et ainsi ouvrir la voie à sa déchéance pour la restauration de la république. Nabelnine se sentait en effet pris au piège. Cependant, même s'il craignait la réaction épidermique du Peuple, il se doutait que pour sa réputation et son avenir, Razard ne pourrait les laisser, lui et sa famille, se faire assassiner par la foule amassée dans ses appartements. Dès lors, il adopta l'attitude qui lui semblait la mieux sier à son rang : la continuité des convictions et la fermeté des positions. C'est ainsi qu'il lui répondit :

- Je ne puis accepter cela, Razard, vous le savez, répondit l'Empereur laconiquement...

A ce moment, la foule hurla. Folle de rage. Des hommes et des femmes, furieux et les yeux exorbités, crachant et postillonnant tandis qu'ils insultaient l'Empereur, s'approchèrent de lui, le bousculant, tentant de le faire fléchir. L'Empereur, bien que particulièrement surpris et décontenancé, même craintif, tenta de n'en rien paraître et de conserver le peu d'honneur et de dignité qui lui restait en ce moment où sa gloire accumulée au cours de nombreuses années était flétrie. Finalement, Razard, après avoir regardé le spectacle, fit un signe de la tête à ses soutiens, afin qu'ils séparent les insurgés de l'Empereur. Lui-même prit alors la parole :

- Bien, Majesté, dit-il, un petit sourire satisfait au lèvres. Vous ne nous laissez donc pas le choix. Vous serez déchu très bientôt, par la Diète, rassemblée dans cette optique. Et vous serez assigné à résidence, des gardes seront posés tout autour du plateau en son pied, afin de s'assurer que vous ne quittiez pas le Palais Impérial, en attendant votre jugement pour crime contre le Peuple belondaure et pour trahison. Votre règne touche à sa fin... vous n'êtes plus notre Empereur, Monsieur de Temararien.

Alors, en un instant, comme s'ils ne faisaient qu'un seul corps, la rage et la colère de la foule se changea subitement en joie, et ils crièrent « vive la république ! » à tue-tête et « mort à l'Empire ! ». L'Empereur ne dit rien, se contentant de regarder la scène, la tête haute, et son Peuple lui échapper... définitivement, alors que, suivant Razard, celui-ci sortait de la chambre.

Quand il n'y eut plus personne, et que l'Empereur était seul avec sa famille, il baissa la tête, se la prenant dans la paume de ses mains. Alors, il sentit quelqu'un tirer sa manche. C'était sa fille Maria-Aurélia, les yeux rouges d'avoir tant pleuré, s'adressant à lui d'un « Majesté ». A ce terme, l'Empereur répondit :

- Allons mon enfant, ne m'appelle plus ainsi, répondit-il en souriant, lui même les yeux humides. N'as-tu pas entendu ? Je ne suis plus Empereur...

A cette phrase, Maria-Aurélia, s'effondra en pleurs, dans un chagrin insurmontable, ne sachant ce qu'il adviendrait de son (ex-)impérial parent. Alors, l'Empereur la prit dans ses bras, continuant à faire des boucles avec ses cheveux, pour la consoler... Et profitant de ce moment d'intimité filial, il oublia enfin tous ses soucis.
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MessageSujet: Re: Ce n'est pas une émeute   Ce n'est pas une émeute EmptySam 4 Déc - 4:54

Le messager envoyé par les triumvirats était reparti. L'Empereur avait accepté d'être emprisonné, de se présenter à la troupe qui le conduirait en prison, certainement sous les cris de haine de la foule elbêröhnitoise en colère, manipulée par la démagogie des trois triumvirs, George Dransse, Albert Frantiers et évidemment le Vicomte de Razard. Il avait envoyé un message au Général Javoue, commandant de la Garde Impériale, afin qu'il n'envoie pas de troupes s'opposer à son arrestation. Il était trop tard de son point de vue. Les dés étaient jetés. Il affronterait avec dignité et humilité son destin, et s'il se devait de mourir comme son père, il en serait ainsi. Cependant, l'homme, car il était un homme avant d'être un Empereur, était une personne de principe. De fait, il se refusait à reconnaître la nouvelle république, proclamée par acclamation, sans aucune consultation du Peuple belondaure. Ainsi, avant de se remettre entre les mains de ses futurs probables bourreaux, il avait une chose à faire.

Se levant de sa chaise de bureau derrière lequel il était assis, continuant à travailler comme s'il était toujours en mesure de présider aux destinées du pays, il entra dans le bureau de feu le Duc de Beneline – dont le corps en charpie avait été entreposé par ses propres soins dans la chapelle du Palais. Il se dirigea vers la commode en chêne. L'ouvrant, il en sortit une feuille blanche. Il n'en avait plus chez lui. Puis, il referma la commode et retourna dans son cabinet, se rasseyant à son bureau. Là, il commença à écrire :


Acte d'abdication de l'Empereur Nabelnine a écrit:
Elbêröhnit, le 7 Nabelnine 2712,

Peuple belondaure,

Après cinq ans à votre service, pour la Nation et notre grandeur, je me dois de vous quitter. Depuis le plébiscite triomphal que vous m'avez offert, je vous ai toujours vu à mes côtés pour l'honneur, la sagesse et la gloire du Belondor. Une partie des députés a décidé de trahir son serment pour des motifs partisans ; j'ai été abandonné par ceux-là même qui m'avaient juré fidélité et obéissance selon la Constitution, et de fait, le Peuple a accepté, sûrement manipulé, des transformations qu'en temps normal il n'aurait jamais accepté, sachant quel péril nous courrons chaque fois que nous nous divisons.

Je sais que j'ai suffisamment de soutiens encore aujourd'hui, que ce soit parmi le Peuple lui-même ou l'armée, pour riposter et recouvrer la plénitude de mes pouvoirs. Mais j'ai juré de ne plus jamais faire couler le sang de mes compatriotes. Et je suis un homme de parole. Dès lors, je me plierai à cette promesse.

Belondaures ! Ne désespérez pas ! Exigez du nouveau gouvernement qu'il respecte vos droits ! Montrez-vous tels que vous avez toujours été : honorables, sages et glorieux, Belondaures avant toute chose, patriotes et indépendants. N'acceptez pas que l'on vous impose un régime sur lequel vous n'avez pas été consulté. Vous vous trahiriez en vous soumettant. Vous trahiriez votre Nation, que vous aimez par dessus tout, je le sais.

Je ne sais ce qui m'attend désormais, mais j'irai à la rencontre du destin quelque en soit le prix ou le sacrifice. Puisse celui-ci vous aider à trouver la voie qu'il vous convient. J'aimerai vous dire à quel point je vous ai aimé durant toutes ces années. Mais je ne le peux par des mots... ils ne retranscriraient pas suffisamment fidèlement ma pensée.

Mes fils et filles, je vous aime tous. Je mourrai pour vous s'il le faut. J'espère que l'honneur, la sagesse et la gloire ne vous abandonneront jamais. Sachez qu'il n'y a pas plus beau sacrifice pour moi que celui pour le Belondor et vous, les Belondaures.

Aujourd'hui, je ne suis plus Empereur. Oui. J'abdique. J'abdique en faveur de mon fils aîné, que je proclame Empereur des Belondaures, sous le nom de Nabelnine II, en attendant que, souverainement, vous décidiez du régime qui vous plaira. Puisse les Dieux vous aider dans cette tâche ingrate et des plus difficiles. Je vous aime Belondaures. Ne l'oubliez jamais.

Nabelnine Ier

L'Empire passait des mains du père au fils. Une nouvelle ère s'ouvrait.
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MessageSujet: Re: Ce n'est pas une émeute   Ce n'est pas une émeute EmptyMar 11 Jan - 8:58

L'Empereur c'était lui désormais. Il le savait, mais ne parvenait pas encore à le croire. Il relisait encore et encore la lettre contenant l'acte d'abdication de son père. Mais il devait se rendre à l'évidence, son père avant de se rendre aux républicains avait renoncé au Trône du Belondor. Ainsi, si les troupes impériales l'emportaient sur les rebelles, c'est lui qui deviendrait Empereur des Belondaures, sous le nom de Nabelnine II. C'est ce qu'il était désormais, puisque le Peuple n'en avait pas encore décidé autrement : Nabelnine II. Il s'était enfin rendu à l'évidence.

Se relevant de la chaise du cabinet de son père, où il avait pris place pour lire l'acte d'abdication de celui qui était désormais Feu Sa Majesté Impériale (mais de cela, le nouvel Empereur n'en avait connaissance), il regarda par la fenêtre sur la ville, laquelle était en proie aux flammes et au chaos depuis un peu plus de cinq heures du matin, suite au déclenchement de l'assaut des troupes impériales sur la Capitale pour la reprendre aux mains de la Garde populaire constituée par le triumvirat républicain. Suite à cela, deux mille de ces Gardes populaires avaient souhaité prendre pied sur le plateau Ceronine II afin d'y trouver refuge, une sorte de sanctuaire et de citadelle imprenable à opposer aux impérialistes. Mais, à leur grande surprise, il y avaient été accueillis par la Garde Impériale dirigée par le Général Javoue, qui donnant l'ordre à ses troupes de sortir des bois, avait forcé ceux-ci à faire marche-arrière avant de se faire déchiqueter par la charge de la cavalerie des légions impériales. L'Empire avait vaincu. Le reste des forces républicaines était soit acculé, soit s'était rendu. Il le savait désormais : il règnerait.

Sortant du cabinet de son père, Nabelnine II, appela un caporal, grenadier de la Garde. Et il lui ordonna de trouver des ustensiles afin de le raser et de lui couper les cheveux comme les portait son trisaïeul Antonine le Grand dans sa jeunesse. Une fois fait ceci, il changea de vêtements, afin d'avoir l'air plus impérial et moins princier. Afin de changer de statut, de symboliser sa mutation en Empereur des Belondaures. Le résultat fut garanti. En rasant son duvet, en se coiffant autrement, et en se revêtant de nouveaux habits, il paraissait cinq ans de plus. Il avait changé. Il était prêt désormais, à faire son devoir.
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MessageSujet: n   Ce n'est pas une émeute EmptyMer 19 Jan - 14:38

Étant entré à la tête des troupes d'infanterie – plus de soixante-dix mille hommes en tout, lorsque l'aube avait commencé à se faire voir, le Général Archibald de La Villejégu avait, une fois s'être assuré que la partie ouest entière de la ville jusqu'au Palais était sous contrôle des légions impériales, pris les rênes de son cheval et commencé à chevaucher au galop, accompagné d'une petite escorte de chasseurs à cheval. Il souhait au plus vite retrouver le Chancelier de Leurs Majestés Impériales, Ministre de l'Intérieur et de l'Échiquier, le Duc Etzel Ito de Varsalance. Il souhaitait savoir s'il avait survécu. Mais surtout, il voulait s'assurer qu'il avait réussi dans la mission qu'il s'était lui-même assigné, alors même qu'il était incapable de combattre de par son surpoids et son absence de formation militaire : sauver l'Empereur et l'ensemble de la Famille Impériale. Lorsque chevauchant toujours, il vit au bout de quelques minutes, un gros groupe d'une centaine de soldats avancer le long du chemin en pente menant jusqu'au plateau, il sut de suite que le Chancelier se trouvait parmi eux. Tapant de ses éperons sur son cheval pour qu'il aille plus vite, il atteint rapidement la pente menant au Plateau Ceronine II. Alors qu'il n'était plus qu'à une petite quinzaine de mètres du Chancelier, il le héla :

- Excellence ! Excellence !
- Ah... Général de La Villejégu, vous voilà, répondit sans grand enthousiasme le Chancelier.
- L'Empereur est-il encore en vie, demanda alors plein d'espoir le Général à son supérieur hiérarchique.
- Oui, il est en vie. Nous allons à sa rencontre précisément.
- Les Dieux soient loués, conclut le Général en levant ses yeux plein de reconnaissance vers les cieux.

Le Chancelier ne dit mot de plus. Il restait fermé, alors qu'à ses côtés, le Général était euphorique... il est vrai qu'il ne savait pas que Nabelnine II était l'Empereur auquel faisait référence le Duc de Varsalance.
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Etzel de Varsalance
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MessageSujet: Re: Ce n'est pas une émeute   Ce n'est pas une émeute EmptyMer 2 Fév - 6:21

Le Chancelier, prolongement de la personne de Sa Majesté Impériale et Royale ainsi que de l'Etat, Haut-Dignitaire de l'Empire, fut le premier à pénétrer dans le Palais Ceronine II depuis l'annonce faite par les Gardes d'Elbêröhnit de la mort de Nabelnine Ier . Derrière lui, suivait le Général extraordinaire de la Villejégu, croyant encore que le Belondor n'avait pas vu sa couronne passer du père au fils.

Etzel avançait résigné, totalement vidé de l'intérieur et au bord des larmes. Chaque pas était un supplice qu'il semblait physiquement porter, son dos se pliant sur son abdomen ventripotent comme si une chape de plomb invisible était posée au-dessus de lui. La tête rentrée dans les épaules il mettait un pied devant l'autre, hagard, sans réellement savoir où il devait aller. Il avait ordonné que les portes du Palais demeurent fermées depuis le Général et lui jusqu'à nouvel ordre, devant s'entretenir avec l'Empereur des suites de l'affaire.
Un sentiment de honte s'était en fait emparé de lui ; il se voyait comme un lâche ayant fui alors qu'il aurait du rester aux côtés des représentants du Belondor et revenir une fois l'ordre établi démontrait - de son intime croyance - qu'il avait été incapable de se battre lorsqu'il aurait dû.


Au milieu du grand hall d'où partaient des escaliers monumentaux le sol était jonché des papiers, de débris et maculé de sang dont on n'aurait pu deviner la provenance. Passant d'une pièce à une autre, les deux hommes filèrent directement jusqu'aux appartements privés de l'Impératrice puis ceux des Princes et de la Princesse qui n'avaient pas été violés par l'intrusion des insurgés mais qui étaient tous vides.
Loin d'être désireux de parcourir chaque étage du Palais à la recherche de l'Empereur, le Chancelier osa alors prendre la voie du Cabinet privé de Sa Majesté qu'il supposait être occupé par le régent du Belondor.

Sommant le Général de la Villejégu de l'attendre dans l'antichambre, non pas par respect du protocole mais simplement car il n'osait lui avouer qu'ils avaient tué Nabelnine Ier en tentant de le secourir, il entra dans la pièce où se trouvait réunie la Famille Impériale autour du nouvel Empereur. Posant un genou à terre, le Chancelier baissa la tête en guise de soumission et attendit les premiers mots de Nabelnine II qui lui faisait désormais face.

La scène s'était passée au ralenti dans la tête du Duc d'Empire, lui laissant le temps de graver à jamais dans son esprit cette passation de pouvoir à laquelle il aurait aimé échapper, bien qu'il connaissait l'état de santé peu engageant de feu Sa Majesté l'Empereur. Il patienta, persuadé que cette entrevue sonnerait le glas d'une ère nouvelle.
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Sa Majesté l'Empereur

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MessageSujet: Re: Ce n'est pas une émeute   Ce n'est pas une émeute EmptyLun 7 Fév - 13:28

Maxenine Nabelnine, désormais Empereur sous le titre de Nabelnine II, était entouré de sa famille. Il avait souhaité se laver, se changer non seulement d'habits, mais également de coiffure et de se raser son duvet de moustache avant de faire face à ses nouvelles obligations impériales. Lorsqu'il était revenu au Cabinet de feu son père, les premières rumeurs faisant état du décès de Sa Majesté Nabelnine Ier avaient atteint la Famille Impériale, par l'entremise de soldats de la Garde Impériale. Ainsi, lorsqu'il entra dans le cabinet de Sa Majesté, le Chancelier vit l'Impératrice Mère et la sœur de l'Empereur en pleurs, en proie à une véritable crise de panique que tentaient désespérément de calmer, tant le Grand Oncle de Nabelnine II que son propre frère, mais également la fiancée d'Amezzianel-Nabelnine, la nièce de Charles de Bordebon, Aurélia-Céliniade, bannie de sa propre famille pour être tombée amoureuse d'un « fils de parvenu usurpateur » et vivant au sein du Palais depuis maintenant presque un an et demi.

Au fond, se tenait à l'écart la fille de feu le Grand Chambellan du Palais Impérial, Caulaincen Ambroisie de Beneline. Celle-ci était restée cachée pendant une journée entière dans les greniers du Palais Impérial. Redescendue le lendemain de la mort de son père, elle avait été prise d'une grave profonde angoisse lorsque l'Empereur actuel lui avait appris la mort de son unique parent, s'évanouissant après une crise d'hystérie. Depuis, elle restait prostrée, se contentant de suivre les déplacements de la Famille Impériale sans dire un seul mot.

Le spectacle qui faisait face au Chancelier de Leurs Majestés Impériales (ou plutôt Chancelier de Sa Majesté Impériale en l'état) était donc pitoyable, épouvantable, tragique même. Ne disant mot et s'agenouillant face à celui qui était désormais l'Empereur, il attendait que Nabelnine II prononce un mot. Ce dernier, levant la main, exigea le silence de sa mère et sa sœur avant de s'exprimer. Il semblait véritablement transformé désormais. Lui, si peu sûr de lui auparavant, sans réelle autorité, était à présent habité par la nouvelle fonction impériale qui lui était dévolue. Sous le regard envieux de son frère benjamin, il prononça alors quelques paroles :

- Votre Excellence. C'est avec plaisir que nous voyons que vous êtes sain et sauf... votre assaut sur la ville...

L'Empereur se tut. Il ne savait s'il devait féliciter le Chancelier d'avoir réussi à rétablir la légalité ou s'il devait lui en vouloir d'avoir tué des milliers de ses compatriotes et d'avoir provoqué plus tôt que nécessaire la mort de son père. « De toute façon, ils l'auraient tué », se dit Nabelnine II. Il continua donc :

- Votre assaut sur la ville a sauvé ma famille. Je vous en remercie... même si le prix à payer est très lourd, pour cela.

De nouveau, il se tut. Depuis fort longtemps, depuis qu'il était né à une conscience politique en réalité, il avait tenu à ne prononcer que peu de paroles, à n'être souvent qu'un silencieux interlocuteur, écoutant beaucoup plus que ne parlant. Il ne souhaitait pas changer de ce côté-ci. S'il comptait affermir son autorité, son aura, sa valeur, il ne comptait pas néanmoins jeter toutes les cartes sur table. Il préférait garder une part de mystère, de pas montrer de suite ses ambitions. Il était certain que son charisme et sa domination n'en sortiraient que grandis :

- J'ai une question, Excellence... la rumeur faisant état du décès de mon père est-elle vraie, interrogea-t-il, indifférent aux sanglots de sa mère et de sa sœur lorsqu'il évoqua la probable mort de l'ancien Empereur. Que s'est-il passé en vérité ? Je veux tout savoir.
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