Discussion intime...

Ségolaine Royel avait donné rendez-vous au Duc d'Origodes ce jour-ci, Mercadine 32 Antonine 2711, afin de discuter de manière intime sur l'entrevue qu'il avait eu avec L'Empereur trois jours auparavant... Ils devaient se rencontrer. Ils étaient les principaux chefs du "parti libéral", cela était leur devoir d'en discuter...

- Bonjour, Excellence... Comment allez-vous ? Votre entrevue avec Nabelnine fut-elle fructueuse ?

Le Duc d'Origodes se doutait bien où elle voulait en venir...

EL/ La discussion se passe le 32 même si nous sommes le 34. /EL

Antonel arriva, pensif et submergé par de nombreux doutes et interrogations. Ce petit rendez vous avec sa colistière et amie allait surement l'aider, elle qui portait souvent conseil.

-Je vais très bien, je vous en remercie.
Ce rendez-vous avec Sa Majesté a été relativement surprenante. Il est tout à fait naturel que je vous en raconte son déroulement, dans les grandes lignes évidement. Notre Empereur a décidé de me fustiger tout d'abord, ou du moins ce que je lui avais confié. Je lui avais suggéré un suffrage censitaire, j'avais critiqué son gouvernement et son Conseil d'Etat, de privilégier leurs intérêts personnels à l'intérêt des belondaures, et l'Empereur s'est senti visé car ayant nommé et aprouvé leurs actions. Puis après avoir fait l'éloge de son action, comme à son habitude, il a conclu en me proposant une ... place dans son gouvernement. Je vous avoue que je ne sais encore que faire.

Ségolaine Royel fut surprise du dénouement relaté par le Duc d'Origodes au cours de cette entrevue... Elle répondit donc :

- Certes, l'Empereur n'allait pas se critiquer lui-même, c'est compréhensible... en vérité ses actions sont assez incompréhensibles, il n'y a pas de cohérence dans l'action de son Gouvernement, les mesures sont prises au coup par coup. C'est la conséquence du gouvernement personnel ! Si le Gouvernement était contrôlé par la Diète, à défaut même d'être responsable devant elle, il n'y aurait pas ces excès...

S'arrêtant, elle reprit :

- Quant à la proposition de l'Empereur elle est surprenante. Très surprenante. Pour ma part, il compte se servir de vous comme caution pour sa nouvelle politique qu'il juge "libérale". Cela reste à voir, des progrès sont perceptibles... il en est ainsi de l'Acte modifiant les prérogatives du Conseil d'Etat : la Diète n'est plus sous la coupe de cet organe de l'Empereur.
Maintenant, je pense qu'il serait prématuré d'entrer au Gouvernement, attendons de voir les réelles évolutions du régime... N'hésitons pas à le soutenir quand il le faut, à le critiquer quand on le doit et à y participer quand il sera juste et opportun de le faire. Eh puis ! Pourquoi se contenter d'une place alors que vous pourriez en prendre la tête ? Le Ministère d'Etat... cela doit être votre objectif. C'est ainsi que nous réaliserons les réformes. Pour ma part, je pense que si nous pouvons soutenir le Gouvernement sur certains points, nous ne saurions participer à celui-ci. Le soutien sans la participation : voilà ma ligne, je pense. Après, nous verrons...

La ligne de Royel n'avait rien de très original. Elle s'était autrefois prononcé pour un système présidentiel avec un Empereur - donc de stricte séparation des pouvoirs -, mais aujourd'hui elle ne fermait plus la porte au système parlementaire... l'avenir déciderait.

Antonel savait déjà que Segolaine allait lui déconseiller de participer au gouvernement, mais lui même ne savait vraiment quelle décision prendre à ce sujet.

-Je dois vous avouer Ségolaine que je doute quand à la réponse que je donnerais à l'Empereur. Je lui ai confié que je ne souhaitais d'un poste de figuration au gouvernement, d'une simple nomination visant à calmer l'opposition qui de jours en jours se montre plus virulente. Mais c'est par la même occasion une grandissime opportunité. Participer au gouvernement permettra de favoriser notre action libérale, et cela ne nous muselera pas pour autant. Nous sommes l'opposition, et lorsque l'on n'est pas en accord avec les actions du gouvernement, alors nous critiquons, et nous le ferons toujours remarquer, que je fasse parti du gouvernement ou non.
Je vous invite par ailleurs à rencontrer les Bordebons qui ont pris contact avec ma personne. Je pense qu'il est nécessaires de les écouter. Sait-on jamais ...

Ségolaine sourit avant de dire :

- Antonel... croyez-moi. Ce serait une mauvaise idée d'intégrer le Gouvernement dès maintenant. Sa Majesté vous a dit vouloir libéraliser le régime ? Eh bien, faisons-lui confiance ! Jouons franc-jeu, et nous verrons, soutenons-le dans ces initiatives... Sur le reste... nous jouerons notre rôle d'opposant !
Mais si cette œuvre de libéralisation est menée jusqu'au bout il devra bien un jour où l'autre se séparer de son personnel autoritaire c'est une évidence ! Qui donc pourra croire que Beneline pourra continuer à conserver le Ministère d'Etat, à défendre une politique qui vise à promouvoir les libertés ? Qui donc pourra croire que Monterel pourra survivre avec une telle politique ? Pas moi... A ce moment-là... quels seront les recours de l'Empereur ? Vous, il n'y en aura pas d'autre.
Ne rentrez pas au Gouvernement, vous avez mieux qui vous attend.

Ségolaine apportait toujours des argument décisifs à chaque discussion. Sa rhétorique frappante était sans doute la clé de la réussite actuelle de la cause libérale au sein de l'Empire. Antonel n'en doutait à aucun moment.

- Je vous fais donc confiance ma chère. J'aimerais par le même occasion aborder une toute autre discussion. Comme je vous l'ai déjà dit, les "légitimistes" m'ont à plusieurs occasions abordé afin de conclure quelques farfelues alliances. Je voudrais connaître votre point de vue sur ce sujet délicat, si cela ne vous dérange pas.

Ségolaine venait de se rappeler, qu'en effet son ami le Duc d'Origodes lui avait parlé qu'il avait été approché par le prétendant au Trône du Belondor - mais cette fois-ci en tant que Roi -... le prince Charles de Bordebon... celui qui se faisait appeler "Charles III". Elle lui répondit :

- Eh bien mon cher ami... vous me connaissez, je n'ai comme dogmatisme que la défense des libertés, politiques, parlementaires, sociales, civiles et économiques. Si Charles III est plus à même de nous offrir ces assurances pourquoi pas ? Après tout la Restauration avait été un régime somme toute libéral... La Seconde Restauration pourrait aussi bien l'être, surtout si elle a besoin de notre soutien ?
Alors évidemment nous n'allons pas nous exprimer franchement pour le Bordebon... d'autant que si le Roi peut peut-être être libéral, les légitimistes sont très souvent autoritaires voire absolutistes. Eh puis, nous risquerions des poursuites judiciaires, et des petits tracas administratifs. Maintenant... gardons deux fers au feu ne pensez-vous pas ? Si jamais l'Empereur na va pas assez loin dans la libéralisation, eh bien... il nous restera une solution de repli...